• Bilan du cours du 16 février 2011

     

    Fais de ta plainte un chant d'amour pour ne plus savoir que tu souffres. (Proverbe touareg)

    Pas de vidéos ce soir. Ni de photos, d’ailleurs. J’ai oublié mon jouet à images... J’y ai pensé avant de partir mais j’avais la tête ailleurs et je l’ai laissé à sa place. On pourrait croire que je suis amoureux. À mon âge !
    En fait, Lara est entrée dans ma vie samedi matin. Une mignonne brunette dont j’ai fait la connaissance sur un site de rencontres... vendredi soir. J’ai appelé le numéro de l’annonce samedi matin à 9 h. Un quart d’heure plus tard, nous prenions la voiture pour 2 heures de route, en direction du fin fond de l’Eure et Loire. Vive le GPS, sans lui, je chercherais encore.
    Coup de foudre à 11 h 30. Retour à la maison à 14 h 30. Lara, 18 mois, abandonnée 2 fois, battue, affamée, un peu labrador noir, un peu... on ne sait pas trop, les pattes bringées nous font penser à un boxer mais les yeux légèrement bridés rappellent le pitbull... Bref, c’est un gros chiot débordant d’amour et de docilité qui fait tout son possible pour redonner le sourire à un vieux bonhomme au gros cœur tout déchiré.

    Bilan du cours du 16 février 2011
    Abandonnée lundi, opérée jeudi, adoptée samedi...
    je me sens bien dans cette nouvelle maison et je veux bien y rester.

    Et l’Aïkibudo, dans tout ça ?
    Quand je suis arrivé au Dojo, Pierre, qui m’avait précédé, m’a dit de sa façon directe : « Tu as une meilleure mine que la dernière fois que je t’ai vu ! ». C’est vrai, ça va beaucoup mieux, ça faisait un petit bout de temps que je n’avais même plus envie d’être de mauvais poil. Ce soir, ça va chauffer !

    Il vaut mieux aller plus loin avec quelqu'un que nulle part avec tout le monde. (Pierre Bourgault)

    Je respecte trop tous ceux de mon petit groupe de fidèles pour leur enseigner des banalités. Je pense plus utile de leur faire découvrir leurs « défauts », leurs tics, leur faire percevoir les sensations, les débarrasser des petits gestes inutiles, casser les automatismes, les conditionnements... Ça ne se fait pas nécessairement sans douleur alors je m’efface autant que possible pour privilégier les démonstrations par des volontaires qui s’engagent implicitement à recevoir critiques et conseils jusqu’à parvenir à une démonstration qui me convienne.
    Une question bizarre, une remarque intempestive me font désigner la « victime » qui va subir mon assaut de pinailleries : à pinailleur, pinailleur et demi. Christophe de Haute-Savoie vous certifiera que je suis depuis longtemps un Maître de la mauvaise foi, capable de soutenir mordicus un avis puis, au cours de la conversation, de renverser la situation et de soutenir le contraire pour amener l’adversaire à soutenir mon point de vue... Purs jeux d’esprit, je ne me verrais pas en tribun politique mais je me sens bien dans la peau d’un enseignant cabotin.

    L’intelligent parle de ce qu’il a vu, et le sot de ce qu’il a entendu dire. (Sagesse populaire Yiddish)

    Une dizaine de participants, cette fois-ci. Christophe m’a envoyé un message pour préciser qu’il serait pris par son service. D’autres sont atteints de mutisme.
    Comme d’habitude, j’ai consciencieusement préparé mon cours. Le contenu de la fiche est une étape sur mon projet annuel : l’expression de Te no Michibiki dans le mouvement et le passage du Chika Ma au Ma.
    J’aime bien commencer mon cours par un « randori Te Hodoki ». On commence tout en douceur, avec la recherche de la fluidité puis, au fur et à mesure que les muscles s’échauffent, les saisies peuvent devenir de plus en dures sans aller jusqu’au blocage, il s’agit d’échauffement.
    Chercher la fluidité, c’est sans compter sur les réflexes conditionnés. Pour beaucoup, Te Hodoki égale atémi ! J’annonce à chaque fois de plus en plus fort ; « Pas d’atémi ! ». Un petit sourire contrit ponctue une tentative avortée, un coude en retrait, un poing fermé...
    Alors que j’ai soigneusement construit mon enchaînement d’exercices, j’oublie tout et je rassemble les élèves. Question : à quoi sert l’atémi dans les Te Hodoki ? Chacun y va de sa réponse visant à justifier ledit atémi. C’est Jaâfar qui dit enfin : « Il sert à finir l’exercice, c’est un point final... »
    Le Te Hodoki en lui-même n’est pas de l’Aïkibudo, c’est un éducatif, une sorte de B-A BA du placement de la force dans la progression de l’apprentissage. Dans la pratique de l’Aïkibudo, il n’y a pas d’atémi, l’Aïkibudo c’est d’abord le mouvement.
    C’est là qu’intervient à point nommé mon nouveau schtroumpf raisonneur, Ludo aux étranges lunettes aux branches rouges.... « Mais, pourtant, Maître, dans Ushiro Kubi Jime, on porte bien un atémi ? »
    « ??? » Si j’ai bien compris qu’il s’agissait d’une question, je n’ai pas compris le terme japonais. Je ne suis pas sûr qu’il m’ait dit Ushiro Kubi Jime ou Ushiro Eri Jime... de toutes façons, je ne sais plus ce que ça veut dire mais ça relance mon cours.
    « Et bien, mon cher Ludo, auriez-vous l’amabilité de passer au centre et de choisir un partenaire ? ». Ces jeunes gens sont vraiment épatants, les plus réservés ont vaincu leurs réticences et sont volontiers volontaires pour aller au centre et subir mes remarques et mon harcèlement jusqu’à ce qu’ils « sortent » ce que j’attends d’eux. Je ne sais pas si j’aurais eu leur souplesse, à leur âge. J’avais un tempérament autodidacte, ils sont volontiers disciples et ne me tiennent pas rigueur de mes remarques parfois sarcastiques, j’ai même été taxé de bienveillance, ce qui m’étonne un peu.
    Ludo exécute son dégagement, fait semblant de porter un atémi, effectue un pas latéral puis s’arrête, perplexe.
    Je demande à son partenaire s’il a mal... Je demande à Ludo de recommencer, avec conviction. Mais l’atémi n’est pas plus convaincant et j’attends toujours une conclusion.
    Un des principes de l’Aïkibudo est d’utiliser un minimum d’énergie pour un maximum d’efficacité. Sobriété et modération. Chaque geste a son utilité. Je demande à Ludo de conclure avec une technique. Il porte une sorte de Robuse qui ne paraît pas (me) le satisfaire.  Je lui suggère de trouver une technique plus évidente en fonction de la position de son corps, de ses mains, il s’agit de continuer dans le sens du mouvement. Il se décide pour Yuki Chigae qu’il veut conclure par une immobilisation maladroite. Je lui demande une projection mais je crains que mon attitude en retrait ne l’ait déstabilisé.

    Je sors de mon personnage de vieux Schtroumpf grognon et je reprends la démonstration en main. D’abord, échapper à l’étranglement en tournant la tête, contrôler le bras qui étrangle avec la main homologue, tourner les hanches pour entraîner le bras de Uke qui retient le poignet : opportunité de porter un solide atémi au bas-ventre, ce qui libère le passage pour glisser sous le bras de Uke. Je contrôle sa main par-dessus et j’applique sa paume contre mon épaule. Je me relève en poussant le coude de Uke vers le haut puis je porte Yuki Chigae en « ouvrant » mes bras, j’oblige Uke à monter sur la pointe des pieds, je le fais reculer et je le renvoie sur son avant en poursuivant la torsion devant son pied avant, ce qui le contraint à chuter.
    L’exercice durera plus longtemps que je ne l’avais prévu. De nombreux conseils individualisés permettent de repréciser diverses notions, d’aller au plus près du geste fluide et efficace, de gommer des tics qui n’ont aucun sens si Tori est conscient du concept de Te no Michibiki voire de signaler des erreurs manifestes.
    Ce groupe sait alterner entraînement, réflexions pédagogiques, remise en question de sa pratique et mise en application immédiate des conseils reçus.

    Lara (9)Vous savez, moi, les Te Hodoki...

    La faiblesse de la force est de ne croire qu’en la force. (Paul Valery)

    Je vais enfin reprendre mon cours tel que je l’avais préparé.
    Deux volontaires viennent me présenter les Te Hodoki sur Dosokute Dori. Toute la question est : « À quoi ça sert ? ». Si c’est pour se livrer à une gesticulation plus ou moins alambiquée, ça ne sert à rien. Le dégagement issu de la saisie doit offrir l’ouverture d’une technique. Le premier dégagement, direct, donne la sensation de Kote Gaeshi. Une seconde forme peut se conclure avec Kote Kudaki.
    Je demande d’imaginer une troisième sortie, en se référant aux techniques de base. Shiho Nage fournit cette troisième forme.
    La notion de mouvement conduit Tori à s’insérer dans la dynamique de l’attaque de Uke et à l’accompagner en « posant » sa force sur celle de l’attaque.
    Les sensations acquises grâce aux Te Hodoki permettront de sentir ce placement au passage à la distance Ma. Un premier test est l’étude du Wa no Seishin.
    Les volontaires vont venir au centre répondre à ma demande, sous forme de consignes précises :
    - sur attaque Dosokute Dori, distance Ma, projeter Uke dans le prolongement de son attaque : amener la main saisie dans l’axe en effectuant un Nagashi pied avant, projeter en avançant la jambe intérieure
    - sur attaque Dosokute Dori, distance Ma, projeter Uke en le renversant sur son arrière : sensation de Irimi, dégagement comme Kote Kudaki
    - sur attaque Dosokute Dori, distance Ma, projeter Uke suite à deux Nagashi pied avant : dégagement comme Kote Kudaki en plaçant dans l’axe, le second Nagashi incite à poser le genou extérieur au sol, Uke passant derrière Tori.
    Les plus anciens s’essaient à Kata Guruma avec un genou au sol puis debout.
    Pour tous ces exercices, la notion de Te no Michibiki permet de placer son corps dans la forme convenable et de projeter Uke sans « moulinettes » parasites.

    Fin et commencement sont des rêves. (Proverbe Sioux)

    Le cours semble passer très vite (en ce qui me concerne). À peine le temps de travailler sur une saisie arrière : Ushiro Ryote Dori Yuki Chigae puis de s’accorder quelques minutes de randori par groupes de trois et il est 21 h 15...
    Au programme du prochain cours, la suite de ce que j’avais prévu sur ma fiche et réflexions sur la stratégie du randori par groupes de trois.
    Cette forme de randori est l’occasion pour Tori de tester sa perception et sa maîtrise du mouvement. Pendant une trentaine de secondes, il doit être actif, offensif, déterminé, sinon ce n’est pas un randori mais une série d’exercices successifs.

    L’amour est aveugle, il faut donc toucher. (Proverbe brésilien)

    Lara (15)Une pause après un randori épuisant.

    Ce qui m'effraie, ce n'est pas l'oppression des méchants ; c'est l'indifférence des bons. (Martin Luther King)

    Je n’ai pas trouvé comment insérer cette citation dans mon propos. Je vous l’offre quand même car je la trouve de plus en plus d’actualité.

     

     

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