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    Douze courageux adeptes sur le tatami ce soir, dont trois qui ont parcouru un long trajet, une quarantaine de kilomètres, pour venir suivre le cours. Neuf Yudansha et trois kyu dont un grand débutant.
    Le décors est planté pour entamer la deuxième phase du développement du concept de Te no Michibiki.
    Je suis toujours heureux de venir donner un cours mais, ce soir, mon corps est de mauvaise humeur car il sent arriver la tempête et l’humidité a réveillé des raideurs qui le fatiguent. Qu’importe, il suffit de s’adapter.

    Traitez les gens comme s'ils étaient ce qu'ils pourraient être et vous les aiderez à devenir ce qu'ils sont capables d'être. (Goethe) 

    En guise d’échauffement, je demande d’effectuer l’éducatif Nigiri Kaeshi. En fait, les pratiquants présents se sont déjà, pour la plupart, échauffés en attendant le début du cours.
    J’observe, je corrige, je précise quelques éléments, on a toujours tendance à passer au plus facile et à négliger les points fondamentaux. Qu’il est difficile de travailler dans l’axe !

    Rien ne sert de tirer sur un brin d'herbe pour le faire pousser... (Proverbe zen)

    Jeannot a passé le 3e dan à la fin du mois de juin. Cette réussite lui a donné l’assurance qui lui manquait, la concentration qui lui échappait. Je lui confie le soin de démontrer et d’expliquer l’éducatif avec un maximum de précision. J’en profite pour lui donner un petit conseil pédagogique : une explication doit être positive. Si l’enseignant met l’accent sur ce qu’il ne peut pas faire, c’est justement sur ce point qu’il attire l’attention.
    Il s’en tire au mieux mais se trouve déconcerté quand je lui demande la forme Ura. Il réagit quand je lui dis : « Tenkan, si tu préfères... ».
    Une erreur, le bras saisi qui tente d’entraîner Uke avec un retard par rapport à la rotation du bassin, donne l’opportunité de la 3e forme où Uke lui tord le bras dans le dos.

    L´échec est le fondement de la réussite. (Lao Tseu)

    Jeannot repasse au centre avec un nouveau partenaire pour démontrer les Te Hodoki sur Ryote Ippo Dori. Influencé par la pratique de Nigiri Kaeshi, il démontre la forme dite de base. C’est là qu’il faut remarquer que si l’éducatif fait travailler dans un plan vertical, le dégagement de la saisie s’effectue par centrage de la main saisie dans un plan horizontal.
    Il faut rappeler que Ryote Ippo Dori est une double saisie Jyunte Dori + Dosokute Dori. Occasion de réviser le Te Hodoki sur ces 2 saisies puis de l’appliquer sur Ryote Ippo Dori...

    Ne marche pas sur les traces des anciens ; cherche ce qu’ils cherchaient. (Bashô)

    Et on passe de la distance Chika Ma à la distance Ma avec l’étude de 3 formes de Wa no Seishin.

    - Si je m’inspire de Nigiri Kaeshi, au moment où Uke me saisit, je tourne les hanches pour l’entraîner, la main saisie descend en supination, remonte en pronation et le bras continue à tirer selon une trajectoire descendante... Point clé : les bras sont toujours semi fléchis, jamais tendus (cause de raideur), jamais fléchis (opportunité de contre).
    - Je commence ma technique comme la précédente mais quand la main remonte, elle poursuit son cercle ascendant en direction du visage de Uke puis la 2ème main repousse le bras dans la ligne de ses épaules
    - Au moment où Uke saisit en Ryote Ippo Dori, j’exécute Nagashi pied avant pendant que la main saisie entraîne Uke en centrant. Je fais passer Uke derrière mon dos en tirant latéralement pour amener au sol le genou homologue à la main saisie.

    Une des clés du succès est la confiance en soi. Une des clés de la confiance en soi est la préparation. (Arthur Ashe)

    Éducatif. Te Hodoki. Du Chika Ma au Ma. Il ne reste plus qu’à aborder un peu de technique. L’étude se fera en Chika Ma puis le développement se fera en Ma.
    Jeannot revient eu centre avec Guillaume. Je leur demande de démontrer Shiho Nage, forme Irimi et forme Tenkan, avec roulade puis avec immobilisation. Ils sont bloqués par leurs sensations. Ils voudraient choisir une forme d’entrée et ils en sentent une autre ! Si Jeannot s’en sort, Guillaume se désorganise. De toute évidence, il ne croit pas à ce qu’il fait. S’il n’a pas confiance en lui, serait-ce parce qu’il n’a pas confiance en son professeur ? La vie ne se met pas en équation, il y a trop de variables, trop de paramètres, trop de hasard... Il suffit de s’adapter et de voir ce qu’on peut faire, avec ses sensations et sa sensibilité. Et Guillaume finit par y parvenir.

    Tout le monde savait que ce truc-là était impossible à faire. Jusqu'au jour où est arrivé quelqu'un qui ne le savait pas, et qui l'a fait. (Winston Churchill)

    Je fais observer que si j’amorce le dégagement de Shiho Nage sur la main qui saisit en Jyunte Dori, je peux enchaîner Yuki Chigae sur la main qui saisit en Dosokute Dori.
    J’entre donc Yuki Chigae, je continue la torsion pour contraindre Uke à descendre à plat ventre, je continue la torsion pour l’obliger à se lever, je continue la torsion pour le contraindre à une roulade arrière.
    En passant dans les groupes, je fais sentir à chacun la continuité de la torsion. Ils constatent qu’il n’y a à aucun moment d’amorce de brutalité, de risque blessure mais qu’il s’agit d’une contrainte continue. C’est la clé de tout mouvement : une contrainte continue dès l’amorce du mouvement jusqu’à sa conclusion sans laisser à Uke l’opportunité de reprendre son équilibre.
    Les élèves ont dépensé beaucoup d’énergie. Pour se détendre, ils effectuent Yuki Chigae contre 2 partenaires saisissant en Ryote Ippo Dori. Entraîner le moins fort vers le plus fort, lui placer Yuki Chigae. En passant sous son bras, le second Yuki Chigae se place. Contrainte vers l’arrière, torsion vers l’avant pour les obliger à descendre à plat ventre, contrôle des bras saisis avec les genoux au niveau des épaules, immobilisation.
    Et pour finir avec un bon Randori : bagarre générale. Tout le monde attaque tout le monde. Une règle : Uke attaque Tori qui place sa technique puis devient Uke avant d’aller s’attaquer à un autre « adversaire »...

    St Léger 10 11 10 (28)