Bilan du cours du 28 mars 2012

Qui exige ou menace, perd tout droit à la courtoisie. (Joseph Kessel)

Quelques absents, ce soir du 28 mars. Silence radio. Quand je viens, c’est pour tout le monde, et plus encore ! Il est vrai que je ne demande rien et qu’on connaît la tyrannie des bénévoles...  Et puis, comme m’avait dit un ami : « Tu es à la retraite, tu n’as que ça à faire. », où va se nicher l’amitié ?
Bienvenue à un petit Kyu qui a osé franchir la porte de notre Dojo sous l’aile bienveillante de François. Il a l’air fragile, le petit Kyu, pas François, mais Stéphanie prendra soin de lui, le petit Kyu, pas de François.
Il fait très beau, Pedro se risque à me demander s’il faut mettre le Hakama... Et quoi, encore une autre question ? En mars, ne te découvre pas d’un fil...

Le talent est un titre de responsabilité.  (Charles de Gaulle)

Jeannot, le culturiste, est aux commandes. Pendant qu’il déroule son échauffement, Pedro me demande ce que je pense de courir autour du Tatami, pourquoi je préfère ceci ou cela, pourquoi dans cet ordre-ci ou cet ordre-là. Jeannot déroule son échauffement, se calant aussi près que possible de la fiche, il prend de l’autorité, le groupe est attentif, Jeannot tient son groupe et serait prêt à maîtriser le cours...
Je peux répondre à Pedro : « Quand l’échauffement suit un ordre aléatoire, les élèves décrochent, se désintéressent, bavardent... un échauffement bien mené permet la prise en main du groupe et conditionne la suite du cours. ». Ce n’est pas vraiment ça que j’ai dit, j’interprète, j’essaie de me rappeler les idées exprimées mais c’est bien ça que je pense. Et Jeannot a été parfaitement maître de sa séquence. Il m’est très facile de prendre la suite.

La route du bonheur est peut-être la route de l'oubli.   (Yasmina Reza)

 Je souffre d’une excellente mémoire. Et j’ai tendance à croire que c’est le cas de tout le monde, du moins de ceux qui pratiquent mon Art car je suis souvent effaré de l’absence de mémoire (voire de culture ?) des jeunes et moins jeunes journalistes politiques et des électeurs en général...
Bref, j’hésite toujours à reprendre un cours, à reproposer les mêmes éducatifs, les mêmes techniques... et puis, à la fin du cours, quand j’entends dire : « Et bien, celles-là, il va falloir les retravailler ! », je pense finalement, comme l'a écrit Nicolas Boileau : « Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage : Polissez-le sans cesse et le repolissez ... »
Toutefois, il est remarquable de constater que si la cervelle semble légère, le corps a bien mémorisé les éducatifs, semblant montrer que ces éducatifs ont été sérieusement travaillés car la fluidité, l’aisance sont là. Je n’ai guère besoin que de repréciser quelques points de détail, quelques conseils individuels.  Je constate une maturation, un accès à un nouveau plan de compréhension et de pratique de notre Art. On sort de l’intuition, de la sensation pour être capable de prendre du recul et d’accéder à la Voie de la maîtrise.
Un éducatif déjà étudié mais abordé selon un autre point de vue est peut-être perçu comme un nouvel éducatif.

Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? (Leibniz)

Le cours proprement dit peut donc commencer avec la série des éducatifs devenus rituels :

Jyunte Dori distance Ma : centrer avec un Irimi « sans déplacement », Nagashi, recul du pied avant, Henka, projection
Jyunte Dori distance Ma : centrer avec un Irimi « sans déplacement », Nagashi, projection dans la ligne des épaules en posant le genou arrière au sol
Jyunte Dori, Hanmi Handachi Waza : centrer en posant le genou avant au sol puis en levant le genou arrière, recul de la jambe avant, Henka, projection
Jyunte Dori, Hanmi Handachi Waza : centrer en posant le genou avant au sol puis en levant le genou arrière, reposer le genou arrière au sol en glissant la jambe avant de façon à projeter dans la ligne des épaules
Jyunte Dori, Hanmi Handachi Waza : centrer en posant le genou avant au sol puis en levant le genou arrière, reposer le genou arrière au sol en glissant la jambe avant derrière Uke, enrouler le bras de Uke vers l’intérieur, Kesa Gake Sutemi
Jyunte Dori, distance Ma : centrer avec un Irimi « sans déplacement », Nagashi, glisser la jambe avant derrière Uke, Kesa Gake Sutemi

Cette série d’exercice offre une approche « éducative » du Sutemi. Le Sutemi tel qu’il se conçoit dans notre Art, s’applique dans le mouvement contrairement à d'autres Arts Martiaux où il se pratique en opposition. 

L’action de centrer, outre le fait qu’elle apprend à mobiliser la force du bassin, initie à la notion de Te no Michibiki.
Nous sommes prêts à expérimenter une série de Sutemi

Plus ancienne que la compétition est la coopération. (Ramatirtha)

Tsuki Chudan : entrée extérieure, clé de bras en descendant très bas sur les jambes (Kiba Dachi), entrée de Kataha Otoshi, Kataha Maki Sutemi
Tsuki Chudan : entrée extérieure, clé de bras en descendant très bas sur les jambes (Kiba Dachi), passer sous le bras de Uke en glissant la jambe extérieure derrière ses jambes, Kesa Gake Sutemi

Une foi n'est tolérable que si elle est tolérante. (Gisèle Halimi)

Tsuki Chudan : O Irimi extérieur, grand déséquilibre de Uke en allant chercher son épaule extérieure, bascule devant Uke, main intérieure sur son abdomen, main extérieure sous sa nuque, Ude Tomoe
Tsuki Chudan : court déplacement accompagnant un important déséquilibre latéral de Uke, bascule latérale, Soto Waki Tori Sutemi

On hait les autres parce qu'on se hait soi-même.  (Cesare Pavese)

Tsuki Chudan : Irimi extérieur suivi de O Irimi qui fait repasser Tori devant Uke, O Irimi Ude Tomoe
À titre indicatif, je montre O Irimi Kubi Jime Sutemi

早起きは三文の徳  

Je crains toujours de lasser mes élèves. Je suis rassuré quand je les entends affirmer leur intention de travailler sérieusement ces techniques, la fin de la saison risque d’être encore bien marquée du signe du Sutemi car il nous reste d’autres formes d’entrée à étudier. Et j’ai encore tant à apprendre.

一石二鳥 

Pedro me dit : « Il va falloir envisager un cours de vieux... ». Je lui réponds : « Mais c’est un cours de vieux, JE suis vieux ! ».
En fait, commencerait-il à se sentir vieux et ne prêcherait-il pas pour sa propre paroisse ?

鬼に金棒 

En fait, en quoi peut bien consister une technique de vieux dans un cours de vieux ? Je parle bien sûr de vrais vieux comme mon ami Monmon, 79 ans, toujours actif et prêt à se livrer à un petit Geiko, notre bon Sensei qui a fêté ses 72 hivers, votre serviteur qui est tout près de son 71ème printemps. De bons vieux qui ont passé l’essentiel de leur vie sur le Tatami et qui assument l’usure du temps qui passe... arthrose, articulations raidies et que sais-je encore ?
Le problème, c’est qu’on se sent fort physiquement, la pratique est lucide, les sensations sont affûtées, le mouvement est net et fluide. Nous sommes capables de passer du très fluide, pour permettre aux pisse-froid de dire : « Ces petits vieux en sont réduits à faire de la danse ! », au très, très tonique pour permettre aux susdits pisse-froid de rectifier leur jugement : « Putain, ce vieux con, il a bouffé du lion ou quoi ? »... oui, je sais, c’est plein de gros mots mais sachez que les pisse-froid sont de grossiers personnages.

Bref, en quoi un mouvement de vieux va-t-il se différencier d’un mouvement de moins vieux ? En fait, le vieux a des soucis d’arthrose cervicales Il arrive qu’un mouvement circulaire trop rapide, une simple roulade provoquent un léger étourdissement. Qui ne doit pas être perçu par ses élèves.
Les articulations de ses hanches et de ses genoux ont perdu une bonne part de leur souplesse. Forcer un Kiba Dachi, glisser au sol pour porter Kesa Gake Sutemi, ça peut être très, très désagréable.
Les vertèbres lombaires ont été tellement malmenées au cours de leur existence qu’elles passent leur temps à récriminer. Alors bien sûr, pour porter un Ude Kake Sutemi académique en plaçant son corps à l’horizontale sur la jambe d’appui puis en exécutant un grand arc de cercle avec la jambe tendue, ponter, se recevoir sur 3 appuis, il faut exercer une forte contrainte sur toute une série de ligaments et de tendons raidis et parfois douloureux.
Ça se fait. Il ne faut pas que les élèves soient touchés par les difficultés du vieux Maître. Pourtant, il arrive que le corps soit moins horizontal, que la jambe d’appui exerce un appui un peu léger, que la jambe tendue n’exécute qu’un tout petit cercle...
Uke chute quand même car il a cru sentir un très fort déséquilibre. Les élèves ont cru voir une technique parfaite. La preuve, leur exécution sera de très bonne facture. Comment pourrais-je ne pas les aimer, mes petits jeunes ?
Ce sera peut-être comme ça, nos cours, à Monmon, à notre Sensei et à votre serviteur, dans 30 ans, quand nous commencerons peut-être à nous sentir vieux.

Connaissez-vous les easter eggs ? Les œufs de Pâques, in french...
Ce sont de petits programmes dissimulés dans des logiciels, dans des pages publiées sur le Web. Quand il reste de la place, les programmeurs s’amusent ainsi à laisser des surprises.
Pour les trouver, il faut être astucieux, connaître le code Konami...

猿も木から落ちる

Imaginez que je me sois amusé à mes heures perdues, et elles sont nombreuses, à en cacher un ou plusieurs dans chacun des 187 articles publiés,
De vilains œufs de Pâques pour des personnages suspicieux qui scrutent chacune de mes pages à l’affût d’une méchanceté destinée à les stigmatiser... Caricatures, révélations, il suffit d’un peu d’imagination et je n’en manque pas !