-
Un air de printemps en rondel
Le temps a laissié son manteau
De vent, de froidure et de pluye,
Et s’est vestu de brouderie,
De soleil luyant, cler et beau.Le jour se lève, Lara secoue ses oreilles et chouine faiblement au pied de l'escalier... 5 heures... tourne, tourne... gamberge. Ma femme se lève et descend l'escalier, elle a soif... 5 heures 1/2... tourne, tourne... gamberge. Les chiffres défilent sur l'écran du radio réveil... tourne, tourne, gamberge... 7 heures... tourne, tourne, gamberge... 8 h 15... j'ai dû me rendormir ! Il est temps de se lever.
Le brouillard qui a posé un voile épais sur la vallée ce matin fait écho avec la brume qui m'obscurcit les pensées. Réveil chaotique ! Si Lara n'avait pas chouiné au pied de l'escalier... Je gamberge. Je gamberge le jour. Je gamberge la nuit. Je dors en pointillés. Mon petit déjeuner se déroule au gré de l'éveil des automatismes, parsemé de nouvelles sur France Inter et de quelques pages d'un gros bouquin...
Vers 9 h, le soleil disperse le brouillard et l'évapore en gouttelettes adamantines. Dérouillage matinal, une douche bien chaude et c'est parti pour la balade matinale avec Lara qui a besoin de se dégourdir les pattes.Les talus du chemin qui monte à travers bois sont constellés de touches multicolores, le blanc éclatant des anémones sylvies*, les flaques de soleil des fausses renoncules, le timide pastel des violettes et même le museau jaune de jeunes jonquilles prêtes à ouvrir leurs grands yeux d'or.
* L'anémone sylvie pousse dans les milieux forestiers, comme son nom l'indique.
Anémone vient du grec anemos (vent). Anémone était une nymphe de la cour de la déesse Flore, où sa beauté rendait jalouses ses amies. Zéphyr, le mari de Flore et un autre dieu du vent, Borée, s'éprirent tellement d'elle, que cela provoqua la colère de Flore, qui changea Anémone en une fleur condamnée à fleurir avant le printemps pour qu'elle subisse les brutales bourrasques de Borée qui éparpille sa corolle aux vents glacés du Nord. Lorsque le doux Zéphyr, dieu du vent de l'Ouest, vient plus délicatement lui donner ses caresses, alors Anémone, fanée, a perdu ses pétales.Il n’y a beste, ne oyseau,
Qu’en son jargon ne chant ou crie :
Le temps a laissié son manteau
De vent, de froidure et de pluye.Lara fait la folle sur les pentes, galope sur leur toison herbeuse, se lance dans de longs dérapages dans les derniers tapis de feuilles mortes dont les sous-couches brunâtres évoluent en humus charbonneux, elle laisse de longues écharpes végétales sur le bitume.
Rivière, fontaine et ruisseau
Portent, en livrée jolie,
Goutte d’argent, d’orfaverie,
Chascun s’habille de nouveau.
Le temps a laissié son manteau« Allons dans les bois, ma mignonne, c'est le printemps qui bourgeonne... », suggérait un refrain dans les années 50. Le printemps ne bourgeonne pas que pour les humains... Dans l'herbage, derrière chez moi, se côtoient 6 brebis et leurs agneaux, pauvres d'eux, c'est bientôt Pâques, et une oie. Cette oie a perdu sa compagne, avant l'hiver. Elle s'est évadée de son enclos où elle s'ennuyait et a rejoint les brebis, intégrant leur petit groupe pour brouter, pour faire la sieste, pour courir au devant du vieux berger qui leur rend visite tous les jours.
Hier, en fin de matinée, un doux soleil libérait les hormones de la gent ailée, ça piaillait, ça babillait, ça chantait, ça chuchotait et ça chuchetait, ça gazouillait, ça flutait, ça titinait, ça zinzibulait et ça zinzinulait; ça appelait, ça interpellait, ça revendiquait dans tous les arbres le long du ruisseau. Mais ça ne cacardait ni ne cagnardait ni ne criaillait ni ne jargonnait ; l'oie, derrière une brebis allongée pour la sieste, étirait son cou, le spiralait, l'ondulait. Puis, elle frotta sa tête contre la cuisse de la brebis, son cou agité de lentes sinusoïdes... Et soudain, elle saute sur la tête de la brebis et s'agite comme si elle avait bondi sur le dos d'une compagne consentante. Réaction immédiate de la brebis qui se lève et se débarrasse promptement de l'oie qui reprend l'étrange reptation de son long cou. La brebis est indignée, elle baisse la tête, gratte le sol d'un sabot menaçant et fonce sur le palmipède qui devrait s'attend au pire. En fait, elle se contente d'une petite poussée du volatile puis repart finir sa sieste. Quant à l'oie, elle passe de longues minutes à lisser son plumage.
Une coccinelle à 8 pattes avec un nounours en peluche... et alors ?
Une oie éprise d'un renard... et alors ?« C'est bel et bon, vénéré Sensei, mais l'Aïkibudo, dans tout ça ? - Aurais-tu donc des élytres dans les yeux et des coprolithes en lieu de cervelle, stupide petit cancrelat ? Ne vois-tu donc pas que toute cette symphonie ailée, toute cette expression de fluidité, de force mesurée est une image vivante du sens profond de notre bel Art Martial ? - Euh... En fait... Certes... C'est-à-dire que... Je crois bien que, en effet... - C'est bien, petit cafard, tu es sur la Voie ! ».
Mon corps est un jardin, ma volonté est son jardinier. (William Shakespeare)
Le printemps, c'est le premier temps, qu'importe la saison. Les photos qui suivent ont pu être prises en automne, en été... qu'importe, elles marquent un premier temps dans divers temps d'une évolution toujours en voie de germination et d'éclosion de bourgeons. « Pourriez-vous répéter, hermétique Sensei ? - Mmmmmm... ».
Il y aura bientôt 50 ans, c'était presque mon printemps... fier 1er kyu !
Le futur Budoka n'était encore qu'un bourgeon.Et 2 ans plus tard, c'était mon printemps de jeune Yudansha... insouciant 1er dan occupé à semer les graines d'une Région et à les faire germer, pousser et fructifier. Il faudrait attendre encore 5 ans la création du CERA et 8 ans de plus pour que notre bel Art Martial se nomme Aïkibudo.
Et en 1986, quelques graines furent semées vers le Québec.
Et 3 ans plus tard, les premiers bourgeons d'une belle amitié commencèrent à y éclore.
Et l'une des fleurs de mon doux et paisible et infini printemps de Sensei Papé.
Et poulvou qué ça doule !7e dan FIAB 2011
2e dan FKSR 1986
A.照り絵 / 七段 教士
Mais mon pays, maintenant, c'est l'hiver...
Oublie tes peines et pense à aimerあなたの悩みを忘れて、愛について考える
Anata no nayami o wasurete, ai ni tsuite kangaeru