• Retour à Caudebec 2011

     

    La plupart des gens travaillent longtemps et durement dans des emplois qu’ils détestent et qui leur permettent d’acheter des choses dont ils n’ont pas besoin et qui servent à impressionner des gens qu’ils n’aiment pas. (Nigel Marsh, économiste)
    Jeudi 7 avril 2011, une belle et chaude journée de printemps. Heureusement, la température n’est pas aussi élevée que la veille. L’air sera plus respirable dans le grand dojo de Caudebec en Caux où je vais donner mon cours annuel, un cours rituel qui va fêter son 40ème anniversaire !
    J’ai pris la route vers 16 h en compagnie de mon épouse et de Lara qui ne veut pas prendre le risque de s’éloigner de son nouveau maître... Nous allons prendre le chemin des écoliers en suivant le cours de la Seine.

    De l'homme à l'homme vrai, le chemin passe par l'homme fou. (Michel Foucault)

    À Caudebec, le cours se déroule de 18 à 20 h, ce qui ne permet pas toujours à ceux qui travaillent d’arriver à l’heure. J’ai toutefois la bonne surprise d’avoir devant moi 22 élèves. Le niveau est on ne peut plus hétérogène, il va du 4e dan très expérimenté au petit groupe de 3 nouveaux, des élèves de Béatrice qui vont affronter leur... troisième cours ! Avec un certain trac voire un trac certain. Seraient-ils impressionnés par un vieux bonhomme assez loufoque pour se livrer à des activités physiques qui ne sont plus de son âge depuis longtemps ?

    Tout homme libre doit s’activer à rendre libre la vie des autres. (Spinoza)

    Ce type de public est le meilleur possible pour un professeur. C’est l’occasion de faire ressentir que l’Aïkibudo est d’abord un échange, une transmission. Les plus expérimentés vont se mettre au service des plus débutants.
    Pragmatiquement, Un Yudansha se rend compte qu’il progresse plus, qu’il comprend mieux les techniques  avec un débutant qu’avec un « vieux » compagnon de route. Le débutant ne sait pas qu’il faut se laisser faire, qu’il faut chuter même s’il ne sent rien. S’il n’est pas déséquilibré, il pratique le Kaeshi Waza sans s’en rendre compte à la grande surprise de son partenaire...
    Objectivement, le professeur peut développer l’enseignement de la même technique au niveau initiation pour les tout débutants puis en la complexifiant suivant le niveau des autres pratiquants.
    « Il n’y a pas de réussite sans maîtrise parfaite des bases. En n’ayant appris que les bases de l'Aïkibudô, on serait capable de reproduire correctement n'importe quelle technique, mais connaître un grand nombre de techniques sans maîtriser les bases reviendrait à construire sur du sable. », a dit not’ bon Maître Alain Floquet.
    Mon cours est d’abord destiné à ceux que je ne vois que rarement mais ceux qui me font l’honneur d’être présents à toutes mes interventions y trouveront leur compte.

    Chaque progrès donne un nouvel espoir, suspendu à la solution d’une nouvelle difficulté. (Claude Levy-Strauss)

    Je vais reprendre la structure d’un cours faisant partie de mes classiques. Action de la main en pronation ou en supination. Techniques symétriques. Analogie saisie avant, saisie arrière. Ces concepts ne seront pas développés, c’est impossible dans le laps de temps imparti. Ils ne seront même pas énoncés. Ils seront présentés dans l’espoir qu’ils soient ressentis de façon à proposer des pistes et des formes de travail.
    Encore une fois, il s’agit de faire prendre conscience des automatismes de façon à laisser place à la réflexion et à la logique. Se concentrer sur le geste, être capable de le répéter dans des situations symétriques. Rien de bien difficile sous réserve de s’extirper du conditionnement...

    Ne vous affligez pas de votre obscurité ; affligez-vous de votre incompétence. (Lun Yu)

    Ludovic dirige un léger échauffement. Le cours proprement dit peut commencer.

    Tori est en Hidari Kamae. Uke saisit en Muna Dori.

    Premier exercice : Uke saisit de la main droite

    - Tori saisit son revers de la main droite pour ouvrir les doigts de Uke. Sa main gauche, en pronation, dégage la saisie en entraînant le poignet de Uke vers son genou avec une torsion qui place la paume en l’air. Application : Kote Gaeshi.

    - pour les débutants : Tori pivote sur sa gauche en entraînant le bras de Uke dans l’axe. Quand Uke tente de se relever, Tori lui exerce une flexion sur le poignet pour l’empêcher de se relever et porte Kote Gaeshi.

    - pour les Yudansha et les bons chuteurs : quand  Uke tente de se relever, Tori l’entraîne sur son avant pour tendre son bras, la flexion se transforme en torsion, Tori porte Neji Kote Gaeshi en effectuant un Tai Sabaki.

    Caudebec 2011 03 07 2 - Tori saisit son revers de la main gauche pour ouvrir les doigts de Uke. Sa main droite, en supination, dégage la saisie en tirant le bras de Uke de façon à le placer parallèlement au plan de ses épaules. Une torsion du poignet contraint Uke à se cambrer. Application : Shiho Nage.

    - Tori entre dans l’axe du coude de Uke en avançant la jambe gauche. En exécutant un picot des hanches, il vient placer la main de Uke près de son épaule en maintenant le bras dans un plan horizontal. Pour projeter Uke, il exerce une contrainte sur son poignet vers son dos en plaçant le bras verticalement.

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    Second exercice : Uke saisit de la main gauche

    - Tori saisit son revers de la main droite pour ouvrir les doigts de Uke. Sa main gauche, en pronation, dégage la saisie en exerçant une torsion sur le poignet de Uke. Application : Kote Kudaki.

    - pour garder une analogie avec Kote Gaeshi, je propose une forme ancienne qui consiste à regrouper les doigts de Uke avec la main droite. Le petit doigt de la main gauche étant placé sur l’articulation du poignet avec le bras, une flexion provoque une douleur qui contraint Uke à poser le genou au sol.

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    - Tori saisit son revers de la main gauche pour ouvrir les doigts de Uke. Sa main droite, en supination, dégage la saisie en repoussant le bras de Uke en le plaçant dans le plan de ses épaules. Application : Yuki Chigae.

    - Tori tient fermement le tranchant de la main de Uke. Il entre en passant sous son bras, exécute un pivot des hanches en ramenant le bras de Uke vers l’avant.  La main gauche vient ramasser les doigts. Il exerce une torsion du poignet qui contraint Uke à monter sur les doigts de pied. Une bascule vers l’avant suivie d’une contrainte sur le coude conduit Uke sur le sol et permet de finaliser une immobilisation.

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    Tori est en Shizentai. Uke saisit en Ushiro Eri Dori.

    Premier exercice : Uke saisit de la main droite

    - Tori saisit ses 2 revers de la main droite pour bloquer les doigts de Uke. Il avance le pied gauche en levant la main gauche. Il pivote en direction de Uke et passe la tête sous son bras ce qui lui permet de saisir le poignet de Uke en pronation et de dégager la saisie. Il porte Kote Gaeshi.

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    - Tori saisit ses 2 revers de la main gauche pour bloquer les doigts de Uke. Il avance le pied gauche en levant la main droite. Il pivote en direction de Uke et passe la tête sous son bras ce qui lui permet de saisir le poignet de Uke en supination et de dégager la saisie. Il porte Kote Gaeshi.

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    Nous n’avons pas le temps de travailler « Second exercice : Uke saisit de la main gauche ». En fait, c’est l’occasion pour le stagiaires de voir s’ils ont bien compris la démarche et sont à même de reproduire le cours dans son intégralité quand ils seront de retour dans leur cours habituel.

    J’ai donné quelques conseils :

    - Uke doit subir une contrainte ininterrompue de l’entrée de la technique à la projection.

    - Uke ne cherche pas à anticiper l’action de Tori, il s’adapte aux sensations sans exercer de blocage pour échapper à la douleur

    - Uke ne chute que s’il est contraint, il est inutile de chuter s’il n’y a pas de déséquilibre

    J’ai proposé à quelques élèves expérimentés de travailler les yeux fermés...
    Un randori vient clore le cours.

    Aller jusqu'au bout, ce n'est pas seulement résister, mais aussi se laisser aller. (Albert Camus

    Les trois très débutants sont venus me faire part de leurs impressions. En fait, ils ont été très... impressionnés ! Tout leur a paru très grand : le dojo, le nombre d’élèves, l’intensité de l’entraînement, la notion d’exigence dans la précision des gestes, la complexité du vocabulaire, le nombre considérable de notions à mémoriser. Je les ai rassurés. La mémorisation se fait petit à petit. C’est le corps, d’abord, qui se rappelle.

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    Quand le soleil s'éclipse on en voit la grandeur. (Sénèque)


     Il suffit de le dire, ça fait tellement plaisir !

    Une petite espionne ?

    Lara Moi ? Vous croyez ?

     Caudebec bureau Et merci pour leur accueil aux nouveaux dirigeants du club de Caudebec en Caux, Sophie la présidente (au centre), Laure-Line la secrétaire et Benoît le trésorier.

     

     

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