• Quelques notes (7)

     


                                  15 JUILLET / 15 AOÛT 1967 :

                   PÈLERINAGE AUX SOURCES, NOUVEAU STAGE À ROYAN

    L’été 1967 fut un bonheur pour les amateurs de jolies choses. Ce fut en effet l'année de la minijupe ! Quel régal ! Ma jeune et jolie épouse et ma sœur, non moins jeune et jolie, bronzées comme des pains d'épices, la portaient à ravir et étaient très admirées sur la promenade du front de mer de Royan.

    Un événement politique allait modifier ma vision de l’Aïki. En effet, le gendre de Charles Sebban, Michel Berreur (du groupe Mochizuki), avait réussi à obtenir la direction technique du stage d'Annecy, habituellement domaine réservé d'André Nocquet (chef de file du groupe Ueshiba). Celui-ci, furieux, on le comprend, se fit attribuer le stage de Royan qui aurait dû revenir à Hiroo Mochizuki.
    Tout ceci se trama sans que les principaux intéressés, les stagiaires, n'en soient informés.


    PREMIÈRE PÉRIODE :
    les frères Warcollier

    Après l’Aïkido très statique de Lemaître et Sebban, je découvris une technique dynamique, souple et finalement très attrayante.
    Ce contact me conquit et me marqua dans mon parcours personnel, tout comme les techniques de Judo, que je pratiquais encore malgré mes cervicales disloquées, continueront à enrichir ma vision des Arts Martiaux.
    Les frères Warcollier étaient très timides et très gentils. Leur style me plut même si leur efficacité laissait à désirer. Bien sûr, avec Daniel Huard, nous éprouvions un malin plaisir à les mettre en difficulté, nous échappant en roulade avant quand il fallait se laisser immobiliser à plat-ventre ou ne sentant rien quand ils nous trituraient des points douloureux,
    du moins à  

    ce qu'en dit la rumeur ou ce qu'affirment les planches anatomiques qui montrent la répartition des points sensibles du corps humain.
    Et mes deux minettes en minijupette venaient parfois perturber le cours. Assises au bord du tatami, elles troublaient les deux malheureux célibataires, à force de croiser et décroiser des jambes dorées à point ou de remonter une bretelle de chemisier qui tenait absolument à offrir aux regards la courbe d'une épaule et le galbe naissant d'une poitrine que l'usage du temps ne permettait pas encore d'exposer aux caresses du soleil, du moins en public !
    Toujours est-il qu'à l'issue de ce stage, je fus admis au grade de 1er kyu de l’école Ueshiba. J'étais déjà 1er kyu de Judo et je participais toujours aux cours de Shozo Awazu. Un jour, j'affrontai un 1er kyu allemand qui me causa bien des soucis. Notre combat dura fort longtemps et, aussi acharnés l'un que l'autre, nous finîmes à égalité. À la fin de la semaine, le maître des lieux organisa une rencontre France - Allemagne. Bien sûr, elle était réservée aux titulaires de la ceinture noire et je n’y fus pas admis. Les Germains écrasèrent les Gaulois, et qui fut le grand vainqueur ? Mon adversaire de l'autre jour. Je trouvai cela très amusant...


    DEUXIÈME PÉRIODE :
    les requins à face de bonze

    C'est maître Nocquet (6ème, 7ème, 8ème ou 5ème dan ?) qui dirigea la deuxième quinzaine. Un pratiquant du Judo de la première heure, avec Kawaishi, et dont il devait être 4ème dan. Personnage bonhomme, phraseur, apparemment spirituel. Ombre au tableau : il parlait beaucoup, mais nous nous entraînions très peu.
    Je me suis toujours fait remarquer durant mes stages. Pas simplement dans le domaine des Arts Martiaux, mais dans n’importe laquelle des disciplines que j’ai étudiées. Je dois percevoir très vite les bases, le B.A.BA, en quelque sorte. La maîtrise en profondeur, c’est une autre affaire, mais toujours est-il que je parviens dans les premiers contacts à faire illusion.
    C’est ainsi que Maître Nocquet me distingua de la masse des pratiquants, des carpettes semi-séniles pour la plupart, et s’enquit de mes origines.

    « Ah ! Ainsi, vous venez de Normandie ? Il y a de très bons clubs dans l’Orne et dans le Sarthe !
    - À dire vrai, je fais partie de la Haute-Normandie, mon club se trouve à Rouen.
    - Comme c’est bizarre, je ne me rappelais pas qu’il y avait des clubs de notre école à Rouen. Et c’est vous le   professeur ?
    - ... »

    Je restai sans voix, vu que j’étais persuadé que seuls les titulaires de la ceinture noire avaient le droit d’ouvrir un club, mais peut-être les règles étaient-elles plus souples dans le groupe dirigé par Maître Nocquet ?
    Et nous en vînmes à parler de passages de grades. De toute évidence, je portais la ceinture marron et non pas le seyant hakama noir. Une certaine aisance à exécuter les techniques de l’École Ueshiba me désignait parmi les futurs candidats au grade supérieur.

    « Ah ! Oui ! C’est pas mal, ce que vous faites. Vous pourriez bientôt être présenté à la ceinture noire. Oui, oui, oui... Bien sûr, vous pourriez faire encore quelques progrès. Disons que si vous me faisiez venir à Rouen avec mes assistants pendant une semaine, je pourrais faire quelque chose, qu’en pensez-vous ?
    - Oui, ben, il faudra que je réfléchisse, c’est toute une organisation... »

     

    En fait de « Voie de l’Unification des Énergies », je venais de découvrir la « Voie du Commerce ». Ce n’était pas vraiment l’idée que je me faisais du monde des Arts Martiaux. Le groupe Ueshiba, très peu pour moi.
    J'eus l'occasion de revoir le personnage les 30 et 31 janvier 1971, au Mans, au cours d'un stage qu'il dirigeait là-bas et auquel j'assistais parce que les deux groupes, Mochizuki et Ueshiba, avaient pris l'habitude de s'inviter à leurs stages respectifs. J’en reparlerai en temps opportun.
    J'avais malgré tout déjà fait de gros progrès dans l’Aïkido Mochizuki, et il me sembla que je gênais à l’EJJL, crise de paranoïa que je crois connaître chaque fois que je fais des progrès dans une discipline quelconque, j'avoue être un instinctif hypersensible, totalement irrationnel dans ses actions comme dans ses jugements, c'est probablement pourquoi j'ai réussi dans les Arts Martiaux et que j'ai, ma foi, un joli brin de style littéraire, ne trouvez-vous pas ?
    Des difficultés financières, et je ne manquerais pas d'en connaître d'autres, firent que je ne renouvelai pas ma licence pour la saison 1967/1968 et que je ne pus par conséquent pas vérifier objectivement cette impression. Toutefois, j'appris que mon absence avait provoqué un certain marasme dans la section. Étais-je donc déjà irremplaçable ?
    Bien que ne m’entraînant pas physiquement pendant cette longue traversée du désert, je ne manquai pas de travailler mentalement, souvenir de la méthode Dynam Ju Jitsu.
    Une sorte de synthèse, une épuration de mes connaissances se firent quotidiennement, et à la rentrée de septembre 1968, j'étais prêt pour la nouvelle formule de l’École Mochizuki : le style Sebban, basé uniquement sur le travail en Chika Ma, était jeté aux orties, et les notions de Ma Ai et d'avant-saisies étaient à l'honneur.
    Tout cela fit que je fus fort bien accueilli à mon retour au club.

     

     


    À suivre...

    80 balais... âge canonique

    Histoire d'un Hakama qui fut blanc 

    7e dan FIAB 2011
    2e dan FKSR 1986

    A.照り絵 / 七段 教士 

    80 balais... âge canonique

     

     

     

    Oublie tes peines et pense à aimer
    あなたの悩みを忘れて、愛について考える
    Anata no nayami o wasurete, ai ni tsuite kangaeru

    80 balais... âge canonique

    mort-de-rire

     

     

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