• Quelques notes (26)

     

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    Rentrée 1982. Jacques Hébert ouvre enfin une section au Centre Sportif Universitaire et démarre avec quarante-cinq élèves.
    Tamura se fâche avec les dirigeants de l'UNA et crée la Fédération Française Libre d’Aïkido et de Budo. Le Yoseikan Budo, qui avait lâché la FFJDA pour la FFKDA (le Karaté), abandonne cette dernière pour la FFLAB. Les clowns continuent leur cirque !
    Catherine, pour des raisons personnelles, abandonne les cours à l'ASAK. Elle abandonnera d'ailleurs bientôt l’Aïkibudo. Dommage ! Mais elle avait besoin de fonder une famille et ne pouvait pas se partager.
    Sur mes conseils, les Stéphanois organisèrent leurs cours collégialement, avec les trois jeunes ceintures noires du club : Sylvain, Alain et Marc. Mon groupe n'avait pas encore la maturité que je souhaitais, car des conflits eurent lieu dans le Triumvirat. Patrick me demanda de jouer les médiateurs, mais je refusai d'intervenir dans les affaires d'un club. J'eus certainement tort. Mais je ne croyais pas assez en moi, je ne savais pas encore ce que je représentais dans notre région.
    24 novembre 1982. Première réunion du Conseil des ceintures noires, le Conseil des Kodansha. Elle avait pour objet la cooptation de Lionel Lefranc. Il oublia simplement de venir... Il ne fut pas coopté. À la suite, tenue de l’École des Cadres, composée des Kodansha, c'est-à-dire les Conseillers Techniques Nationaux, et des Conseillers Techniques Régionaux.
    Nous avons compris ce jour-là que, si nous n'arrivions pas à faire briller notre image de marque, c'est que nous ne disposions pas des moyens médiatiques des autres groupes. Il nous fallait d'urgence réaliser un ouvrage technique de fond. Alain Floquet déplora notre « liberté intellectuelle », doux euphémisme pour dire que le CERA était peuplé d'abominables Gaulois, indisciplinés et irrespectueux.
    Et nous reparlâmes de notre appellation. Aïkido ? Aïkibudo ? Et il fallait protéger l'appellation de Kobudo.
    Alain s'inquiétait aussi du pillage technique de notre École. Le groupe Nocquet, le CAB, ne jouait pas le jeu et allait apprendre les Kata de Ken Jutsu auprès de Hiroo Mochizuki qui les avait remaniés à sa sauce, et en fonction de ses nombreux oublis. Des élèves du CERA se rendaient de leur propre chef dans des stages d'autres écoles, y montraient leur façon de faire, et pire, ramenaient de mauvaises formes et les enseignaient... Nous décidâmes qu'un élève du CERA ne devrait en aucun cas participer sans autorisation à un stage d'une autre école.
    Alain Roinel avait fait scandale en refusant le 1er dan à tous les candidats d'un examen ! Il apparaissait que leurs professeurs s'abstenaient, depuis des années, d'assister aux cours qui leur étaient destinés. Ceci expliquait cela.
    On parlait de plus en plus d'une grande Fédération regroupant officiellement tous les courants de l’Aïkido pour la saison 1984... De notre capacité à nous structurer dépendait notre existence.
    C'est le 19 mai 1982 qu’Alain Floquet a opté officiellement pour le nom Aïkibudo, tirant un trait sur le passé. Laissons-le raconter :

    C’était une époque où ces Maîtres venaient diriger des stages en France et en divers pays Européens. C’est ainsi que le 19 mai 1982, lors d’un stage que nous avions organisé à Paris avec les Sensei Mochizuki Minoru, Sugino Yoshio, Torigai Yoshi, l’UNA FFJDA organisa en l’honneur de Mochizuki Sensei, dans les salons de l’hôtel Maillot,  un cocktail auquel je fus invité. Sur place, je retrouvais Minoru Mochizuki Sensei, Hiroo Mochizuki Sensei, Tamura Nobuyoshi Sensei, le président de l’UNA, diverses autres personnalités. À un moment, Mochizuki Minoru Sensei m’interpella et l’on se réunit autour de moi. Là, il me dit : « Alain, ce que tu fais, ce n’est pas de l’Aïkido. Il faut changer le nom ! ».  Il proposa alors « Yoseikan Budo ? ». Bien sûr, Hiroo Mochizuki Sensei et moi répondîmes spontanément et en écho : « Non, ce n’est pas possible !  ». Le Sensei proposa alors « Aïki-Jujutsu ? ». Ma réponse fut : « Non, ça ne va pas ! », et nous échangeâmes sur ce sujet. Je dis alors : « Ce qui correspond à ce que je fais, c’est Aïkibudo. » Mochizuki Minoru Sensei répondit : « C’est bien » puis les autres Sensei présents répondirent l’un après l’autre : « C’est bien ». Dont acte. Dès cet instant ma pratique et l’art qui en découlait prenaient officiellement le nom d’Aïkibudo©. C’est ainsi que s’écrit l’histoire de l’Aïkibudo©.

    Et nous jetâmes les bases du Kihon Nage Waza et du Kihon Osae Waza.
    Rentrée 1983. Je publiai une lettre aux ceintures noires, particulièrement intransigeante. Patrick avait bien changé en trois ans de présidence. Il était de plus en plus attentif à mes explications du concept d’École Traditionnelle et se chargea d'éditer et de diffuser lui-même cette lettre.
    La Fédération Française d’Aïkido, Aïkibudo et Affinitaires (2F3A) fut créée. La FFAK n'existait plus. L’Aïkibudo était devenue réalité. Les Conseillers Techniques Nationaux devinrent Délégués Techniques Inter Région Aïkibudo, ou DTIR.
    En ce temps-là, le logo fédéral respectait les co-disciplines et n’affichait que le Kanji KI, commun aux 3 disciplines, AïKIdo, AïKIbudo et KInomichi.

    Toutefois, nous étions littéralement mis sous tutelle : il avait été décidé que nous ne disposerions pas de notre budget qui serait géré par la région Aïkido et qu’un observateur de l'Aïkido serait présent à nos passages de grades pour vérifier que nous ne fraudions pas ! Les cadres de l’Aïkibudo semblaient dans l’ensemble s’être résignés à courber l'échine sauf... votre serviteur : j'avais adressé une lettre à la 2F3A (dommage, à l'époque c'était manuscrit, je n'en ai pas de copie) pour assurer que si un tel individu se présentait dans mon Dojo, je l'obligerais à passer les épreuves et que s'il n'était pas au niveau, je le sortirais à grands coups de pompe. Il me semble me rappeler que les termes n'étaient pas beaucoup plus châtiés. Je n'ai jamais reçu de réponse, personne ne s'est jamais pointé sur mon tatami et si, là-bas, ils ont de la mémoire, je n'y ai pas que des amis…
    Nous étions majoritaires dans ma région et nous étions très économes. Les gens de l'Aïkido étaient très dépensiers et invitaient des cadres à grands frais. J'ai fait un tapage suffisant pour que les comptes finissent par être définitivement séparés dans toutes les régions. Je vous le dis, je ne dois pas avoir que des amis, d'autant que quelques-uns de ceux qui étaient déjà en poste à l'UNA puis à la naissance de la 2F3A sont toujours là, aux manettes !
    Sylvain se retira de l'ASAK pour devenir mon assistant à Bourdeny Aïki Kobudo. Il lui fallut quelques raclées pour s'adapter à nos mœurs courtoises et il devint un personnage fort agréable et précieux.
    À la demande des Caudebécais, le cours du samedi se consacra au perfectionnement de l’Aïkibudo, future École des Cadres. Le cours du lundi soir fut dès lors consacré au Kobudo, et Éric Lemercier, qui venait de passer quinze jours chez Sensei Sugino, devint mon adjoint.
    À la réunion du Conseil des Kodansha du 4 décembre 1983, Hervé Villers démissionna de son poste de président du CERA pour se consacrer à sa famille et renouer avec la technique. Le programme officiel pour le passage du 1er dan et le programme spécial pour le Brevet d’État devaient être prochainement diffusés. Nous rappelâmes qu'il était hors de question d'aller participer aux entraînements des autres écoles, même si leurs pratiquants devaient être les bienvenus dans nos clubs.
    Il fut précisé que si notre École, Art martial véritable, se soucie de réalisme, nous refusions toute violence susceptible de décourager moralement et physiquement les débutants.
    La Normandie continuait son évolution. Je sentais bien que je n'avais pas travaillé en vain depuis des années et des années quand je fus récompensé le 26 février 1983. Mes six candidats au 2ème dan furent reçus, à Paris, et félicités par le maître : Annie , Sylvain , Michel , Gérard , Alain et Marc élevèrent d'un cran le niveau de la Haute-Normandie.
    Un mois plus tard, jour pour jour, au stage annuel de Saint-Léger-du-Bourg-Denis, assuré cette année-là par Alain Roinel, ce fut une prometteuse fournée de 1er dan, avec Annette , Éric , Jean-Sébastien , Jocelyne et Patrick.
    J'avais fait un pari. Je présentai le petit Éric qui n'avait aucune confiance en lui. Son niveau était médiocre. Mais je sentais que c'était la solution pour l'aider à s'éveiller. Le jury fut clément, puisqu'il fut reçu. Alors le petit Éric se mit à croire en ses aptitudes. Le grand Jean-Sébastien le prit plus que jamais sous son aile, mais au lieu de le protéger, il le secoua, l'initia, finit de le sortir de sa coquille. Éric devint un des fins techniciens et des plus dynamiques artisans de la Haute-Normandie.
        

    À suivre

    80 balais... âge canonique

    Histoire d'un Hakama qui fut blanc 

    7e dan FIAB 2011
    2e dan FKSR 1986

    A.照り絵 / 七段 教士 

    80 balais... âge canonique

     

     

     

    Oublie tes peines et pense à aimer
    あなたの悩みを忘れて、愛について考える
    Anata no nayami o wasurete, ai ni tsuite kangaeru

    80 balais... âge canonique

    mort-de-rire

     

     

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