• Bilan du cours du 30 mai 2018

     

    Je voudrais tant être ce que j’étais quand je voulais être celui que je suis devenu ! (Marlon Brando)

    Mon dernier cours avait été donné le 18 avril. Il y a presque 1 mois et demi. Entre temps, il y a eu les « week-ends prolongés » du joli mois de mai et notre beau voyage au Canada. Je ne m’attendais pas à être attendu comme si c'était le « retour du père prodigue » mais quand même...
    Les vestiaires sont très vides et très sombres, je préfère attendre dehors, au soleil, sous un grand ciel bleu. Les minutes s’égrènent, trop lentement. Stéphanie arrive peu après 18 h 50, suivie de Sylvain, Rémy, Kamel, Eddy et enfin Mélanie. Je n'ai pas vu Jeannot et Guillaume depuis des semaines.
    Que devient mon club ? Je dis « mon » club car c’est moi qui l’ai créé, en 1980. Bourdeny Aïki Kobudo avait été le Hombu Dōjō de la Normandie ! C’était l’époque glorieuse où on pouvait compter sur 25 élèves réguliers, tant aux cours pour adultes d'Aïkibudo ou de Kobudo qu'aux cours pour enfants, où 30 Yudansha et
    1er Kyu fréquentaient assidûment le cours du samedi et 70 à 80 stagiaires les stages de Ligue et où la région avait frôlé les 400 licenciés.
    Nous sommes-nous endormis dans le conformisme, la routine ? L’élan créatif a-t-il laissé la place au ronron, à l’entre-soi ? Pour se développer, il faut un grain de folie accompagné d'un solide soutien administratif, de quelqu’un qui a le sens de la publicité, qui ne craint pas de solliciter tous les mois les journaux, la TV régionale. Il faut se faire connaître, attirer de nouveaux licenciés, former une nouvelle génération.
    Qu’est-ce qui intéresserait de jeunes recrues ? Une méthode facile, rapide, efficace ?
    Alors, AKBD contre MMA ? Un Aïkibudo self défense, court, rapide voire brutal, qui permet d'apprendre à se défendre en 12 leçons ?
    Peut-on apprendre à se défendre ? À mon avis, on a l’instinct de défense ou on ne l’a pas. J’ai vu jadis ma jeune femme, 1,58 m et 45 kilos, mettre à terre un grossier personnage aux mains baladeuses qui avait été payé en retour d’une gifle retentissante et suffisante pour le jeter au sol. Au contraire, de grands gaillards ont pu se trouver paralysés devant une situation à risque malgré la pratique d'un Art Martial.
    Un long travail sur le Tatami apporte la stabilité, l’attitude, la confiance en soi qui peut dissuader un éventuel agresseur ou, mieux, fait oublier la crainte d'être agressé. Comme m'a dit Kamel, notre Art s’apprécie, se comprend dans la durée. On découvre, on apprend tout le temps. C’est un Art, ça demande de la patience, de la ténacité, et beaucoup de temps avant d’être maîtrisé.
    « Et alors, vénéré Sensei André, quelle est votre solution ? - Soigner mon genou, petit bousier, ensuite advienne que pourra. »

     

    Le destin bat les cartes mais c’est nous qui les jouerons... (Bernard Moitessier)

    J’ai 6 élèves devant moi. Je demande qui est volontaire pour diriger l’échauffement. Mélanie, méfiante, marmonne que chacun ici, sur le Tatami, est capable d’assumer cette responsabilité. « Soit, Mélanie, merci d’être volontaire. Choisis une partenaire». Stéphanie me regarde interloquée. Elle est la seule à être « une » partenaire.
    Mes 2 victimes désignées d'office se mettent face à face au centre du Tatami. J’arrête ce moment de torture mentale en leur demandant de se mettre face à moi. Nous allons nous échauffer progressivement à partir d’un Randori canalisation sur Tsuki Jodan.
    Départ au ralenti, sans roulade, c’est Tori qui commence à s’échauffer en fortifiant ses jambes. Les Uke s’échauffent doucement puis amorcent les roulades. Le rythme s’accélère peu à peu au gré des participants.
    Je constate avec plaisir que le travail effectué cette année a porté ses fruits. Le contrôle est précis, la canalisation est ressentie tant par Tori qui éprouve une sensation de satisfaction, de plénitude, que de la part des Uke qui se sentent emportés par la canalisation et roulent naturellement dans le déséquilibre.

    Mélanie à l’œuvre. S'entraîner avec quelques robustes gaillards québécois lui a apporté un supplément de confiance qui se lit dans son attitude.


    Dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s'est passé. (Terry Pratchett)

    Le corps de la séance va se dérouler sur Ryote Dori en distance Ma.  Les 2 partenaires sont en même garde. Le but est de se déplacer ensemble, Tori utilisant O Irimi, et d’observer ce qu'il est possible de placer suivant que Tori contrôle en pronation ou en supination.
    Dans la forme pronation, Tori crée une réaction de Uke en poussant son corps en avant, comme pour effectuer Oshi Kaeshi, avant de contrôler le poignet de Uke en pronation et d’effectuer O Irimi en canalisant Uke sur sa réaction.

    L’attaque de Kamel est sincère, on voit qu’il est repoussé et revient avec force, permettant à Mélanie de le canaliser. Il s’agit d’un premier essai, pour percevoir les sensations.

    On notera que l’intensité est réelle et que ça décoiffe... si j’en juge par le petit geste de Mélanie après chaque projection.

     

    Ce n'est pas vraiment que j'ai peur de mourir. Mais j'ai tellement peur de m'ennuyer quand je serai mort. (Pierre Lazareff)

    Pour l’instant, on est dans une recherche de force qui pourrait favoriser le travail des épaules et restreindre l’amplitude du Tai Sabaki.
    Je propose un exercice où les 2 partenaires commencent à se déplacer en O Irimi sans tenter de saisir, épaules basses, les mains s’effleurant. Quand Tori se sent prêt, il saisit les poignets de Uke et le projette dans l’élan du mouvement.

    Attention à ne pas sautiller pendant les O Irimi. C'est dû à un manque de flexion des jambes qui ne permet pas la sensation des pieds qui glissent sur le Tatami. Notez, dans la projection, l'engagement du bassin dont la force est transmise par les épaules qui restent basses.

     

    L’amour n’est pas seulement un miracle né d’une rencontre, il est, jour après jour, ce que l’on veut qu’il soit. (Martin Gray)

    Si Tori saisit le poignet de Uke en supination, il ne peut pas le projeter directement. Il le déséquilibre en l’entraînant au plus près du sol puis le renvoie sur son arrière.
    Première forme, Tori reste d’abord debout, il recherche une forte extension vers l’avant au moment de la projection.
    Seconde forme, il entraîne Uke avec une rotation du bassin qui lui fait poser le genou au sol.

    Sylvain et Kamel en action.

    L'art d'écrire est avant tout de se faire comprendre. (Eugène Delacroix)

    Exercice un peu plus complexe : Tori doit faire tourner Uke  autour de lui avant de le projeter. L’important mouvement développé par le bassin lui fait poser le genou au sol.

    Stéphanie n’est pas satisfaite, elle se sent en déséquilibre arrière. Pourtant, je dis : « C’est superbe ! » mais Rémy est dubitatif. J’accorde un second essai. C’est réussi. Stéphanie a les bons appuis en posant le genou au sol.

    Rémy me regarde et me dit : « Tout à l’heure, quand vous avez dit "superbe", Stéphanie n’était pas complètement penchée en avant en me faisant passer derrière son dos ? ». En voilà un qui est sur la voie d’un bon Uke : sentir les erreurs de Tori et les lui signaler.

     

    Là où la volonté est grande, les difficultés diminuent. (Nicolas Machiavel)

    Il est temps de passer à des activités ludiques. Les sensations développées, notamment l’utilisation rationnelle de la force, vont être mises en application sur Ryote Ippo Dori contre 2 adversaires. Dans un premier temps, il s’agit d’une forme de Randori canalisation en Wa no Seishin.

    Mise en application par Mélanie.

    Et, pour le plaisir visuel, Stéphanie en action en contre-jour.

     

    Si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant. (Talleyrand)

    La règle du jeu se complique. Les Uke attaquent simultanément et chacun entraîne Tori de son côté, comme pour l’écarteler. Tori teste le plus fort des 2 adversaires, tourne les hanches vers lui et se sert de sa force pour entraîner l’autre de façon à les rapprocher. À ce moment, il lui suffit de prolonger l’action de ses « mains guides » et de saisir les poignets tels qu’ils se présentent, naturellement et, Ô miracle, Uke 1 subit Shiho Nage pendant que Uke 2 est contrôlé en Kote Gaeshi et que les 2 sont projetés au sol, dos à dos.

    Mélanie en action. Je lui demande de recommencer de façon à obtenir un gros plan sur les mains.

    Et voilà. Impeccable...

     

    Le bonheur, c’est d’être heureux ; ce n’est pas de faire croire aux autres qu’on l’est. (Jules Renard)

    Une autre application avec un double Yuki Chigae.

    Stéphanie en action. Elle cherche comment placer le second Yuki Chigae. Il suffit de passer entre les mains de Uke 2...

     

    Si tu n'as pas tout ce que tu veux, réjouis-toi de ne pas avoir ce que tu ne veux pas. (Bob Dylan)

    Un complément à cette application : quand les 2 Uke sont immobilisés au sol, Tori les relève en portant un double Hiji Mage Hikitate.

    Mélanie s’amuse beaucoup. Elle n’oublie cependant pas d'orienter ses 2 victimes vers l’objectif de façon à les présenter de face.
    Au-delà du jeu, il y a bien sûr un travail d’utilisation de la force, de canalisation et de précision dans l’application des techniques.
    Dans le premier exercice, on peut considérer que Shiho Nage et Kote Gaeshi se présentent sans intention de la part de Tori mais naturellement à l’issue du mouvement.
    Par contre, le second exercice est l’application d’une stratégie où Tori agit en fonction de ce qu’il veut obtenir.

     

     Pour faire la paix, il faut être deux : soi-même et le voisin d'en face. (Aristide Briand)

    Un petit Randori pour finir. Rien de mieux qu’un Randori canalisation où toutes les nouvelles sensations peuvent s’exprimer.

     

    Histoire d'un Hakama qui fut blanc 

    7e dan FIAB 2011
    2e dan FKSR 1986

    A.照り絵 / 七段 教士 

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    Oublie tes peines et pense à aimer

    あなたの悩みを忘れて、愛について考える 

    Anata no nayami o wasurete, ai ni tsuite kangaeru

    mort-de-rire

     

     

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