• Bilan du cours du 21 février 2018

     

    Belle soirée. Ciel clair sur un air à 3° qui font clignoter  un voyant sur le tableau de bord du Berlingo : Risque de verglas, tu parles, Charles ! J’écoute un bon jazz sur France Musique quand je me retrouve derrière un bouchon à l’entrée du rond-point qui mène à l’A 28… Ça se dégage assez vite mais la bretelle est bouchée et je vois une interminable file de camions sur l’autoroute. Là, il y en a pour très longtemps car le tunnel est fermé et tout ça doit se dégorger dans Rouen.
    Je réussis à me dégager
    de la bretelle sans trop de mal et je remonte vers Isneauville, le mont Perreux, je prends la petite route forestière qui descend vers Saint Martin du Vivier. Je connaissais bien ces petites voies du temps où l’autoroute n’existait pas.
    Finalement, je n’aurai mis que quelques minutes de plus que d’habitude et, pour la peine, j’ai une belle place libre au parking du Dojo.

     

    Les câlins ne sont pas seulement délicieux, ils sont nécessaires. (Kathleen Keating)

    Vous savez quoi ? Je suis de bonne humeur en entrant dans le Dojo ! Je n’ai pas ce petit pincement habituel au niveau du cardia ni ce picotement au fond de la gorge. Oui, j’avoue, malgré un demi-siècle d’enseignement des Arts Martiaux, j’ai toujours le trac dès la veille d’un cours et quand je monte dans l’avion pour aller voir nos cousins d’en face, je m’en veux pendant tout le voyage d’avoir accepté leur invitation. On ne se refait pas, paraît-il, mais ce soir, je suis détendu et de bonne humeur.

    En fait d'amour, vois-tu, trop n'est pas même assez. (Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais)

    Mélanie, qui rentre tout juste de La Havane, a  encore la tête dans le sac. Pour l’aider à surmonter le jetlag*, je lui confie l’échauffement, ce qu’elle accepte avec son enthousiasme légendaire.
    (* pour les éventuels béotiens qui l’ignoreraient, il s’agit du syndrome du décalage horaire, ou arythmie circadienne)
    Ensuite, elle fera un excellent Uke, le susdit jetlag ayant endormi tous ses menus blocages.

     

    La seule vie qui soit passionnante est la vie imaginaire. (Virginia Woolf)

    Ce soir, j’aimerais apporter une touche finale à la notion de sensation. Nous utilisons une distance de prédilection que nous nommons le Ma Aï. La notion de distance nous vient du Kendo où le combat commence à la distance où les pointes des Shinaï se croisent :  Issoku Itto no Ma Aï, il faut effectuer 1 pas pour toucher l’adversaire.
    En fait de distance, nous devrions parler d’intervalle (合間, Aï Ma en Japonais, Ma Aï dans notre interprétation) et c’est cette notion d’intervalle qui va relativiser notre sensation car à la notion de distance s’ajoute celle de temps.
    Quand nous étudions un mouvement, quand nous jouons en Randori, nous appliquons le Tai no Sen : l’entrée est simultanée à l’attaque. Cette situation nous donne une sensation d’efficacité et d’harmonie. Elle se prête à l’exécution de mouvements amples, esthétiques et néanmoins non dénués d’efficacité. Elle se prête à de belles démonstrations, dans l’idée du duel, de l'esprit chevaleresque comme dans les films de cape et d’épée.
    On peut ainsi pratiquer toute sa vie notre bel Art Martial dans la sensation du Tai no Sen en s’offrant de temps en temps de petites cures de Chika Ma pour entretenir la bonne utilisation de la force. Au risque de rester dans le domaine du conventionnel puis de la complaisance, ce qui est normal entre amis, et on oublie très vite la notion de sincérité.
    Dans un combat réel, il faut amener l’adversaire à commettre une erreur, anticiper son attaque, décider de celle qu’il devra porter. Nous entrons dans la sensation du Sen no Sen.
    Tai no Sen ou Sen no Sen, nous créons l’ouverture. Tai no Sen, nous entrons quand l’adversaire choisit son attaque en fonction de l’ouverture. Sen no Sen, nous entrons avant cette attaque, l’adversaire réagit en mode réflexe et porte l'attaque que nous avons choisie.
    Je vais proposer 2 exercices d’entrée esquive canalisation en recherche de Tai no Sen puis de Sen no Sen. Nous avons déjà étudié ces exercices sur Tsuki Jodan. Il est bon d’insister sur la précision de la position de la main qui contrôle le bras de Uke.

     

    J'arrange volontiers ma vie comme un roman, les moindres désaccords me choquent. (Gérard de Nerval)

    Exercice de Tai no Sen bien connu, entrée esquive canalisation, abordé lors du dernier cours au niveau de l’entrée que je ne vais pas développer ici.

    On peut le pratiquer à 2...

    ou à 3.

     

    On court après le bonheur, et l'on oublie d'être heureux. (François Cavanna)

    Exercice non moins connu en Sen no Sen. Pour inciter Uke à attaquer selon son choix, Tori doit créer une ouverture en plaçant son poids sur l’arrière puis entrer pour provoquer l'attaque de Uke.

    Dans cette première séquence, si le bruitage de Mélanie est de très haute qualité, la sensation n’est pas exprimée de façon convaincante.

    Cette fois-ci, on voit bien le retrait du corps qui permet une entrée pénétrante. J’aurais aimé que les jambes soient mises à contribution dans un passage en Kiba Dachi. À mettre au compte du jetlag.

     

    Le plagiat est la base de toutes les littératures, excepté de la première, qui d’ailleurs est inconnue. (Jean Giraudoux)

    Cet exercice en sensation de Sen no Sen se prête parfaitement à l’exécution de Mukae Daoshi. Le rôle de Uke est important. Tori le contraint à poser sa main au sol. Pour éviter d’être projeté sur son avant, Uke tente de se relever et Tori n’a qu’à l’accompagner pour placer Mukae Daoshi.

    Une interprétation de Stéphanie puis de Sylvain. La sensation du Sen no Sen est très peu exprimée. Une sensation difficile à percevoir ? Encore des notions à travailler : l'intention et la détermination.

    Rémy nous offre une belle démonstration bien que le Sen no Sen soit encore timide.

     

    Si j'étais immortel, j'inventerais la mort pour avoir du plaisir à vivre. (Jean Richepin)

    Tai no Sen, Sen no Sen, il faut de l’espace pour y recourir. Dans une foule, les déplacements ne sont pas commodes et l’intervalle est plus proche du Chika Ma que du Ma. Impossible d’entrer pour Tori, il doit s’effacer en transférant son poids sur le pied arrière pour effectuer un Nagashi. C’est la sensation de Machi no Sen.


    Belles démonstrations de Rémy sur une attaque Tsuki Jodan. On retrouve l’éducatif Shinogi dans l’esquive canalisation de l’attaque. Rémy devrait plus transférer son poids vers l’arrière. Peut-être l’intervalle est-il un peu trop long pour proposer une vraie sensation de Machi no Sen.

     

    Les paroles d'un poète sont déjà ses actions. (Alexandre Pouchkine)

    Une attaque redoutable à courte distance est le coup de couteau à l’abdomen, quasiment en distance Chika Ma. Nous allons rechercher la sensation de Machi no Sen sur Tsuki Chudan.

    Que ce soit Jeannot ou Guillaume, aucun ne transfère suffisamment son poids sur l’arrière, ils pourraient même entrer car l’intervalle est trop grand. On l’observe particulièrement sur Jeannot qui a une garde très ouverte. Si l’intervalle se raccourcit, l’espace entre les pieds se réduit.

    Guillaume exécute son mouvement au ralenti pour bien montrer la canalisation qui s’appuie sur le poing de Uke. Il faudra revoir cet exercice en insistant sur le retrait du poids du corps sur la jambe arrière avec rotation du bassin. Nagashi sur pied arrière n’est pas facile !

     

    Pour bien faire, mille jours ne sont pas suffisants, pour faire mal, un jour suffit amplement. (proverbe chinois)

    Une série de Randori pour conclure ce cours. Randori technique en ligne pour commencer puis Randori contre 1 ou 2 adversaires.

     

    Des avenues.
    Des avenues et des fleurs.
    Des fleurs.
    Des fleurs et des femmes.
    Des avenues.
    Des avenues et des femmes.

    Des avenues et des fleurs et des femmes.
    Et un admirateur.

    Eugen Gomringer

    N’est-ce pas beau comme un Haïku ? Depuis 2011, ce petit poème du Bolivien Eugen Gomringer orne  une des façades de l’École supérieure Alice Salomon à Berlin. Ce texte de 1953 qui parle d’allées, de fleurs, de femmes se termine par « un admirateur », ce qui fait polémique.
    Les personnes qui étudient (pour éviter étudiants qui est un terme trop masculin), estiment que ce poème représente une tradition artistique patriarcale et réduit la femme à un objet sexuel. Ils.elles exigent donc qu'il disparaisse de la façade de leur établissement. La présidente est d'accord et estime qu'il n’est plus adapté à la société actuelle. Il va
    donc sans doute disparaître.
    Je ne suis plus adapté à cette époque !

     

     Histoire d'un Hakama qui fut blanc 

    7e dan FIAB 2011
    2e dan FKSR 1986

    A.照り絵 / 七段 教士 

    mort-de-rire-copie-1.gif

    Oublie tes peines et pense à aimer

    あなたの悩みを忘れて、愛について考える 

    Anata no nayami o wasurete, ai ni tsuite kangaeru

    mort-de-rire

     

     

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