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    Un Loup n'avait que les os et la peau,
    Tant les chiens faisaient bonne garde.
    Ce Loup rencontre un Dogue aussi puissant que beau,
    Gras, poli, qui s'était fourvoyé par mégarde.
    L'attaquer, le mettre en quartiers,
    Sire Loup l'eût fait volontiers ;
    Mais il fallait livrer bataille,
    Et le Mâtin était de taille
    A se défendre hardiment.
    Le Loup donc l'aborde humblement,
    Entre en propos, et lui fait compliment
    Sur son embonpoint, qu'il admire.
    "Il ne tiendra qu'à vous beau sire,
    D'être aussi gras que moi, lui repartit le Chien.
    Quittez les bois, vous ferez bien :
    Vos pareils y sont misérables,
    Cancres, hères, et pauvres diables,
    Dont la condition est de mourir de faim.
    Car quoi ? rien d'assuré : point de franche lippée :
    Tout à la pointe de l'épée.
    Suivez-moi : vous aurez un bien meilleur destin. "
    Le Loup reprit : "Que me faudra-t-il faire ?
    - Presque rien, dit le Chien, donner la chasse aux gens
    Portants bâtons, et mendiants ;
    Flatter ceux du logis, à son Maître complaire :
    Moyennant quoi votre salaire
    Sera force reliefs de toutes les façons :
    Os de poulets, os de pigeons,
    Sans parler de mainte caresse. "
    Le Loup déjà se forge une félicité
    Qui le fait pleurer de tendresse.
    Chemin faisant, il vit le col du Chien pelé.
    "Qu'est-ce là ? lui dit-il. - Rien. - Quoi ? rien ? - Peu de chose.
    - Mais encor ? - Le collier dont je suis attaché
    De ce que vous voyez est peut-être la cause.
    - Attaché ? dit le Loup : vous ne courez donc pas
    Où vous voulez ? - Pas toujours ; mais qu'importe ?
    - Il importe si bien, que de tous vos repas
    Je ne veux en aucune sorte,
    Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor. "
    Cela dit, maître Loup s'enfuit, et court encor.

     

    Jean de LA FONTAINE   (1621-1695)

     

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    J’ai toujours éprouvé d’énormes difficultés à apprendre par cœur, me soumettre à une autorité, imposer mon autorité, me référer à une norme...

    C’est ainsi que j’ai refusé d’apprendre « Le laboureur et ses enfants » et que ça m’a valu de nombreuses heures ( ?) à genoux sous le tableau noir, quand j’avais 8 ou 9 ans... Impossible de me faire réciter ne serait-ce que la première phrase. Peut-être que je ne pouvais pas obéir à l’injonction : « Travaillez, prenez de la peine... » !

    Alors les fables de La Fontaine ne faisaient pas partie de mes lectures préférées ! Pour composer le répertoire de poésies de mes élèves, je préférais les poètes contemporains, Paul Fort, Robert Desnos, Charles Cros... jusqu’à ce que je retrouve dans ma bibliothèque les « Fables de La Fontaine » en livre de poche.

    J’ai feuilleté ce vieux bouquin que je n’avais quasiment jamais ouvert. Je me suis laissé ensorceler par le vieux magicien. J’ai cherché un texte original qui puisse séduire mes petits élèves et je me suis arrêté sur « Le loup et le chien ».

    Quelle merveille, quelle superbe histoire à lire et à dire... Je l’ai lue une seule fois et elle s’est définitivement gravée dans ma mémoire.

    Je l’ai dite à mes élèves qui ont voulu l’apprendre. Ils l’ont mémorisée en 2 jours ! Tant ils souhaitaient l’interpréter devant leurs camarades.

    Et le loup, me direz-vous, qu’est-il devenu ? Je crois qu’il est allé demander asile à l’abbaye de Thélème.

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    Cette fable est la préférée de mon épouse qui n’en a pas oublié un mot depuis ... qu’elle l’a apprise dans une petite école des Ardennes.

    Demain, 1er septembre, c’est son anniversaire, alors je la lui dédie.

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